fbpx

Quand j’habitais en ville, je promenais surtout mes chiens en laisse. 

C’est logique! Il y a des lois et il faut les respecter. Quand on est un citadin, c’est ainsi qu’on promène nos chiens. 

Lorsque j’ai déménagé à la campagne, j’ai commencé à promener principalement mes chiens en liberté. Le bonheur! J’ai continué à faire quelques marches en laisse de temps en temps, mais ces promenades sont devenues davantage utilitaires, c’est-à-dire pour se rendre quelque part. Les balades urbaines de style trio-de-vidange (pipi, caca énergie), sont devenues rares. Nos sorties en forêt sont devenues notre activité principale. 

Et ça a transformé leur focus! 

Helé a grandi à Montréal. Elle a été un chien citadin pendant plus d’un an et demi. Rina et Seph, eux, ont toujours vécu à Huberdeau. La relocalisation de la métropole francophone d’Amérique du Nord à un petit village niché au coeur des montagnes laurentiennes a apporté beaucoup de changement dans nos vies. 

Une de mes réalisations les plus intéressantes a été au niveau de la relation que le type de promenade, en laisse ou en liberté, a sur l’intérêt pour les distractions.  

Dans cet article, nous verrons : 

  1. Quels choix avons-nous lorsque notre chien voit une distraction lorsqu’il est en laisse
  1. Quels choix avons-nous lorsque notre chien voit une distraction et est libre
  1. Les conséquences sur le comportement du chien
  1. Quoi faire si on n’a pas la possibilité d’offrir de la liberté à son chien

Il s’agit d’un article plutôt technique destiné aux gens qui ont déjà quelques connaissances en entraînement.  

Que faites-vous quand votre chien voit une distraction en promenade en laisse? 

Même avant de déménager à Huberdeau, je me suis dit que quelque chose clochait avec les marches en laisse. J’avais déjà remarqué que, lorsque je promenais BébéHelé et Koro, ma défunte husky, elles étaient constamment à l’affût des distractions et « décrochaient » difficilement. Les écureuils et les autres chiens étaient nos pires ennemis. 

Je me suis demandé pourquoi. 

C’est simple, que faisons-nous lorsque notre chien voit une distraction lorsque nous le promenons en laisse? Nous tapotons sur nos cuisses, nous lui disons d’avancer, nous tentons d’attirer sur attention, nous attirons avec une gâterie et, si vraiment rien ne fonctionne ou qu’il peut potentiellement se mettre en danger (par exemple s’il veut aller sentir de la vitre cassée, manger un restant de repas bien « mûr » avec des os cuits que quelqu’un a abandonnés sur le trottoir) nous tirons sur la laisse pour continuer. Parce que nous sommes attachés à notre chien, comme lui l’est à nous, nous n’avons pas le choix de rester là tant qu’il n’obtempérera pas. 

Donc soit on reste là, et le chien se renforce à continuer ce qu’il fait, ou on dire et ça déclenche son réflexe d’opposition, c’est-à-dire sa volonté d’aller de l’avant. Les deux seules solutions qui s’offrent à nous ne feront que donner encore plus envie au chien d’aller voir les sacs poubelles, les trucs à manger, les autres chiens, les écureuils ou les passants. 

Que faites-vous quand votre chien focus sur une distraction en promenade en lousse?

Lorsque je me promène en forêt ou dans un champ avec mes chiens. C’est très différent. 

Mes chiens sont entraînés à rester à vue et à ne pas s’éloigner. C’est une règle très stricte que j’entraîne et ré-entraîne constamment.  

S’ils voient quelque chose d’intérêt, comme une piste de mulot dans l’herbe haute, un rongeur dans un arbre ou bien des pas de chevreuils dans la neige, ils vont investiguer. Et moi, pendant ce temps-là, je continue ma route.  

Que se passe-t-il alors? 

Le chien finit de faire ce qu’il fait et s’en vient ou, alors, puisqu’il est seul, laisse sa distraction et rejoint son humain. 

Parce que les chiens sont entraînés à rester proche, lorsqu’ils s’intéressent à une distraction, j’ai la possibilité de m’éloigner. Plus le chien reste à la distraction et plus la distance entre nous est grande. Grâce à mon entraînement et parce qu’ils sont programmés génétiquement pour ne pas vouloir rester seul trop longtemps (ce sont des bergers après tout), ils finissent par venir me rejoindre et sont renforcés pour le faire. La distance entre nous agit comme une punition négative, P-, c’est-à-dire le retrait de quelque chose que le chien veut. Plus le chien s’intéresse à la distraction et plus P- devient grande. Le fait de me retrouver agit comme un soulagement (R-) et comme un renforcement positif puisque je leur offre une récompense d’une forme ou d’une autre.  

Quelle est la différence entre promener son chien en liberté ou en laisse? Le fait qu’on est attaché à notre chien. 

Lorsque nous sommes en liberté, nous pouvons nous éloigner, car nous ne sommes pas attachés par une corde. 

Quelles conséquences est-ce que ça a sur les chiens?

Le fait de ne créer aucune frustration et de ne pas augmenter le désir du chien pour la distraction ainsi que la possibilité de s’éloigner a des différences énormes sur l’intérêt du chien pour ce qui se trouve dans son environnement. 

Selon mes observations, lors des promenades en laisse, les chiens ont beaucoup plus de difficulté à décrocher des distractions. En observant ce phénomène, je me suis demandé ce qui pouvait bien le causer. Selon moi, il y aurait six raisons principales. Je crois que la laisse est directement responsable de quatre de ces raisons et le contexte des deux autres. 

Vous êtes prêts? Allons-y! 

Les raisons pour lesquelles la balade en laisse entraîne le chien à devenir hyper-focus sur les distractions : 

  • L’autorenforcement et le retrait du conflit entre rester là et venir nous rejoindre

On en a déjà parlé. 

Pouvoir s’éloigner lorsque le chien voit une distraction crée une punition négative chez les chiens pour qui la proximité avec nous est valorisante. Plus le chien reste avec sa distraction et plus nous nous éloignons. Le chien se retrouve donc en conflit avec le fait de rester là ou de venir nous rejoindre. C’est notre responsabilité de s’assurer que son envie de rester avec nous soit plus forte que la distraction. (Je vais être honnête, ce sera plus difficile avec un terrier ou un primitif! On ne se racontera pas d’histoire.)

Comme la laisse nous force à attendre proche du chien lorsqu’il trouve une distraction, nous ne pouvons pas nous éloigner et créer un mini conflit entre rester proche de nous ou continuer de s’autorenforcer avec l’environnement. Le chien apprend donc qu’il peut terminer d’interagir avec sa distraction sans problème, car nous allons l’attendre, bien qu’en ronchonnant.

  • Le réflexe d’opposition

J’en ai parlé, mais pas en détail. 

Vous vous dites donc, eh bien moi je n’attendrais pas que mon chien finisse par m’écouter! Si je dis qu’on continue, on continue

Ok pas de trouble. Je comprends ça. 

Vous prenez donc votre laisse et continuez. Le chien, car il est attaché, n’a pas le choix de vous suivre. (Je ne parle pas ici de quelqu’un qui tire son chien dans le but de le « swigner » dans les airs, mais bien de mettre juste assez de pression pour qu’il vous suive.) 

Problème réglé, non? Non. 

Le fait de tirer sur la laisse lorsque nous devons forcer le chien à nous suivre (ça arrive! Je ne suis pas ici pour vous chicaner) déclenche ce qu’on appelle le réflexe d’opposition. Vous voulez bâtir de la valeur pour quelque chose? Empêchez le chien d’y aller et tirez-le loin de ceci! On se sert de ce principe en sport canin pour monter l’envie et l’excitation pour les jouets ou la nourriture. Imaginez l’effet que ça a sur les écureuils et les amis-canins dans la rue! 

Non seulement il a encore plus envie de plonger par en avant, mais ceci crée de la frustration. Ces deux mécanismes sont hyper efficaces pour augmenter le désir de votre chien d’aller… dans le sens contraire d’où vous voulez qu’il aille! 

Cette technique est géniale afin de créer de la motivation pour quelque chose en particulier… comme tout ce que vous voulez que votre chien ignore en fait! 

  • La frustration

Quand un chien est en laisse, il se sent pris. C’est ainsi, c’est comme ça. On aura beau entraîner autant qu’on veut, le chien est au bout de sa corde, c’est la réalité. 

Chez beaucoup de jeunes chiens ou chiens de race à haute énergie ou intensité, le fait de se sentir pris entraîne beaucoup de frustrations pour lui. 

Cette frustration monte son niveau d’excitation (l’état d’éveil) qui, lorsqu’il est haut, rend les chiens hyper-focus sur son environnement. Ceci est co-morbide (ça veut dire que les deux s’alimentent l’un et l’autre) avec le réflexe d’opposition. 

Le promenade en liberté, au contraire, ne cause pas de frustrations, car le chien peut faire ses choix. Il a envie d’aller à droite? Il y va. De plus, courir est naturellement auto-apaisant et aide à faire baisser le stress. Lorsque de la balade en laisse, le chien l’accumule, car il ne peut peut pas marcher à un rythme naturel, les chiens marchant plus vite que nous, et il ne peut certainement pas courir.  

Parlant de frustration du chien induite par les promenades en laisse, l’inverse est aussi vrai! Pensez juste à comment vous sentez votre énervement monté lorsque votre chien sniffe, sniffe, sniffe et resniffe le même endroit pendant 5 minutes et que vous êtes pris à attendre, car, vous aussi, vous êtes au bout de la corde et que vous devez rester là alors que vous voulez avancer! Pensez aussi à comment vous êtes frustré lorsque votre chien tire en laisse et vous balance d’un endroit à l’autre. 

Ajoutez à ceci la fatigue mentale d’être vous-mêmes vigilants, de devoir entraîner et surveiller et votre frustration sera assez haute! 

  • Le fait de se sentir pris et la réponse combat-fuite

À cause de la laisse, le chien et l’humain se sentent « pris ». Or, nous ne prenons jamais nos meilleures décisions lorsqu’on se sent contraint. De la même manière qu’un chien réactif réagira plus en laisse, car il ne peut s’en aller, les réactions de son humain seront aussi moins efficaces, moins réfléchies et plus négatives. 

Lorsqu’un être vivant subit un stress, il a le choix entre figer, attaquer ou s’enfuir. C’est vrai pour tous les habitants de notre planète. On appelle ça la réponse combat-fuite. Si vous êtes pris, vous ne pouvez vous enfuir. Il ne vous reste alors qu’à attaquer, même si la menace n’est pas si grande. 

C’est la raison pour laquelle certains chiens sont réactifs en laisse, mais pas en liberté! Ce phénomène est aussi vrai pour les humains. 

L’environnement aussi cause en partie ce problème. 

  • L’environnement en ville est hyper stimulant. 

Même si les distractions sont nombreuses dans le bois et que la perspective de perte de contrôle peut être stressante pour l’humain qui ne veut pas que son chien se sauve, ces distractions sont plus espacées. La balade en milieu urbain est un flot continu de lumières, sons, odeurs, de gens, de chiens, de voiture, etc. Tout change, tout bouge, tout est en mouvement. Tout ceci continue à monter l’état d’éveil, ce qui crée de l’hyper-focus et de la surstimulation, nous l’avons déjà dit. 

  • La pression sociale sur l’humain

Selon le climat local, la pression sur le chien pour ne regarder personne, ne rien sentir, ne pas démontrer d’intérêt envers quoi que ce soit et agir en automate peut être immense.

Durant la crise des pitbulls de 2016 à Montréal, Helé avait alors 4 mois. Elle était le plus mignon petit bébé border collie et, même à ça, je me suis fait demander dans la rue si elle était un molosse et si elle était dangereuse. La pression envers les chiens d’agir en robot bien éduqué était immense et la tension palpable. 

Même si la situation s’est aujourd’hui calmée au Québec, il n’en reste que promener son chien en milieu urbain comporte un certain degré de stress. Plusieurs personnes se sont déjà fait accoster dans la rue tout simplement, car leur chien avait regardé un passant. Je n’exagère rien. 

Bref, la pression sociale sur le promeneur est immense et son chien ressent ce stress. En réponse à ce stress, l’excitation du chien monte et il regardera partout a la recherche de la menace dont il doit se méfier. Son humain regardera partout aussi à la recherche de potentiel problème ou d’éléments qui pourrait faire que son chien n’agisse pas de manière optimale. 

Vous n’êtes pas convaincue? J’ai une amie qui a un berger allemand noir. Il ne se passe pas une semaine sans que quelqu’un ne jette un regard craintif envers son chien, juste car il existe. Elle a beau se répéter qu’elle a confiance en son entraînement et son chien, ça devient lassant. Elle est constamment en train d’analyser si son chien pourrait ou non être en train de froisser quelqu’un pour cette raison. 

Lors de balade en lousse, le mouvement, l’absence d’hyperstimulation, fait baisser cette pression et il est plus facile pour l’humain de se calmer et d’être zen. 

Comment offrir de la liberté à notre chien s’il ne peut pas être libre

Ce qui ne veut pas dire que la promenade en lousse est toujours possible. Certains chiens ont énormément de proie et doivent être tenus au bout d’une laisse. Un endroit clôturé permet de garder le chien en semi-liberté tout en évitant les fugues, mais permet moins de mouvement. De plus, certaines fois, on aura beau s’éloigner lorsque le chien est libre, la distraction sera trop intéressante. Par contre, je suis convaincue que l’entraînement règle en grande partie ce problème. 

De plus, comme dit en introduction, ce n’est pas tout le monde qui a la possibilité de promener son chien en liberté. Les lois municipales existent pour une raison et il faut protéger la population. Si vous habitez au coeur d’une ville, trouver des endroits où détacher son chien peut être difficile. 

Rien ne vous empêche par contre de faire des balades de détente de temps en temps, de préférer des moments pour vous balader sans trop de stimulation. Faites la liste des choses qui causent de la frustration à votre chien ou qui vous en cause à vous! Vous avez le droit de les éviter ou de mettre en place des moyens pour les résoudre. 

Pour éviter de vous faire tirer par votre chien, et pour éviter de développer son hyper-focus envers l’environnement, la technique de la Marche Zen dans Sans Tension vous aidera énormément.